C’est la Radiodiffusion française qui annonce le démarrage, le 24 octobre 1944 d’une nouvelle radio animée par des collabos. « Jean Paquis et d’autres commentateurs pro allemands bien connus sont de nouveau sur les ondes mais cette fois depuis l’Allemagne. Goebbels leur a donné une station de radio qui a émis hier soir pour la première fois sous le nom de Radio Patrie. » Une nouvelle reprise dans une dépêche de l’agence Reuters. En fuite dans les bagages de l’armée allemande, les collaborateurs sont très divisés. Le dernier carré des fidèles du gouvernement de Vichy se retrouve à Sigmaringen avec le maréchal Pétain et Pierre Laval, où les Allemands leur offrent la possibilité d’avoir leur propre station de radio, « Ici la France !« . Les collabos les plus ultras suivent Jacques Doriot, le leader du Parti populaire français, au bord du lac de Constance. Parmi eux, une partie de l’équipe de Radio-Paris, la station contrôlée par la propagande allemande pendant l’Occupation. Mais ces derniers ne s’entendent pas du tout avec l’équipe francophone de la Voix du Reich, le service extérieur de la radio nazie. Doriot obtient d’avoir sa propre radio. Les studios sont installés dans les locaux de Radio Stuttgart repliée à Bad Mergentheim. Un émetteur mobile utilisé auparavant pour les soldats de l’armée allemande en Europe de l’Est est installé à Mühlacker. Il diffuse sur 208 khz-1442 mètres mais avec une puissance relative, 20 kw, qui ne lui permet pas d’être entendu au delà de l’Est de la France.
Le « speaker nazifié »
Les nazis français bénéficient d’une plage horaire plus grande que la radio de Sigmaringen. Radio Patrie émet de 6 à 9 heures et de 14 heures à 1 heure du matin avec neuf bulletins d’information quotidiens. Les propos diffusés sont ceux que l’on peut lire dans le quotidien que le PPF édite en Allemagne sous le nom de Petit Parisien.
Qui trouve-t-on à l’antenne ? Il y a celui qui cristallise la haine des Français libérés et qui sera plus tard fusillé. Il s’agit de Jean Hérold-Paquis qui après avoir travaillé sur les ondes franquistes de Radio-Saragosse est entré à Radio Paris où ses chroniques enflammées le font connaître. « Hérold-Paquis, vieille connaissance, est toujours là, et la voix rugueuse qui, sous l’occupation, nous fit si souvent crisper les poings, de colère, s’efforce à trouver des accents émus pour pleurer le « chef », – entendez Doriot, peut-on lire dans « Ce Soir », un quotidien communiste. Cela ne vaudrait pas même d’être mentionné si le porte-parole de Goebbels ne nous apportait, une fois de plus, la preuve que la 5e Colonne ne renonce pas. Le speaker nazifié nous rappelle que la mort d’Antonio Primo de Rivera, en 1936, n’empêcha point les phalangistes, de triompher, ces phalangistes « qui menaient dans Madrid une guerre impitoyable, celle de la 5e Colonne » ; et il lance un appel à ceux qui, en France, restent d’irréductibles partisans de l’hitlérisme.«
L’équipe de « Je suis partout »
Sur Radio Patrie, qui se proclame le poste de la libération française, sévissent également André Algarron, chargé notamment l’édito politique de la radio et Pierre-Antoine Cousteau, rédacteur en chef de Paris-Soir et directeur politique de l’hebdomadaire « Je suis partout » pendant l’Occupation. A leurs côtés, Dorsay, de son vrai nom Pierre Vilette, rédacteur de « Je suis partout », Jean Lousteau, Waffen SS français et Emile Nedelec, ancien combattant de 14-18.
Les bombardements se font plus pressants et la radio quitte les ondes pendant près de deux semaines, fin février-début mars 1945. A la mi-mars, les services d’écoute américains la capte également sur la longueur d’ondes de 278,6 mètres, celle d’Ici la France ! qui n’émet plus depuis le 2 mars. Puis certains collaborateurs commencent à fuir. André Algarron écrit son dernier édito dans le Petit Parisien de Konstanz à la mi-mars. Quant à Jean-Hérold Paquis, il signe une dernière chronique militaire dans même journal le 3 avril. Difficile de savoir quand Radio-Patrie a cessé d’émettre. En tout cas, elle n’a pas pu exister au delà du 6 avril 1945 car ce jour-là, l’armée allemande fait sauter les antennes de Mühlacker devant l’avance des Alliés. Quatre jours plus tard, les tirailleurs marocains de l’armée française s’emparent du site.
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